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Champidor : clap de fin

1 Août 2024 | Les Gazouillades de Pascal SERRE

Champidor : clap de fin

 

La presse s’en est fait l’écho : Champidor, l’emblématique champignonnière de Chancelade, n’a pas trouvé de repreneur, laissant le site abandonné, une friche cachée dans le ventre de la terre avec ses 47 salariés sur le carreau ; le tout dans un silence assourdissant, si ce n’étaient mes efforts pour mobiliser un repreneur.

Il y a trois ans, Marc Lebris, un grossiste de Rungis, propriétaire de plusieurs entreprises en Europe et via la holding familiale Sofiprim, faisait l’acquisition de Champidor sans que les raisons de cette acquisition soient évoquées ; Marc Lebris ne vint que quatre fois, dont une pour répondre à ma requête en mars 2023, une pour le dépôt de bilan en décembre 2023, et une dernière pour la liquidation en juillet 2024.

Je me suis souvent interrogé sur les motivations de Marc Lebris mais aussi sur la façon dont une telle entreprise pouvait fonctionner dans de telles conditions. Les investissements et restructurations prévus au départ n’ont jamais été réalisés. Dès lors, on peut imaginer que Marc Lebris voulait faire disparaître un concurrent… le plus tranquillement possible.

C’est tardivement, en mai, que j’ai pris la mesure du danger en provoquant une réunion de tous les acteurs. Ce jour-là, je suis parvenu à faire dire à Marc Lebris qu’il valait mieux pour tous qu’il cède la main.

L’implacable procédure judiciaire rendait toute reprise impossible. Je me suis accroché ; j’ai vu cinq repreneurs, et un s’est détaché. Nous avons poursuivi tous deux la réflexion dans une solitude extrême. La Ville de Chancelade a proposé au mandataire judiciaire de payer les frais de sécurisation du site jusqu’en novembre afin de donner du temps au repreneur ; en vain, nous n’avons jamais eu un quelconque retour.

Les salariés, oubliés durant une dizaine d’années, essorés par les épreuves à l’issue incertaine, n’avaient plus la force de soutenir un projet de reprise : tout simplement, ils étaient vidés de leur substance et enclins à une conversion professionnelle. Dont acte : le repreneur a décliné tout en regrettant, car, comme il m’a toujours soufflé : « il y a un potentiel, il y a quelque chose à faire. »

La belle histoire des champignonnières si chères à André Marquet s’est achevée dans une longue agonie programmée ; cette dernière vraisemblablement commanditée par une économie qui se ferme aux sentiments et privilégie les chiffres et les stratégies financières.

Cet épilogue tragique aurait pu être évité. J’en suis convaincu. Dont acte.

Pascal Serre